A la fin de l’été 2010, j’ai appris que j’étais enceinte…Drôle de sensation et beaucoup d’émotions, j’avais toujours imaginé que j’aurais des enfants mais c’était là. Pour de vrai. J’y pensais beaucoup à ce petit être qui allait grandir en moi. Lors du premier rendez-vous chez la gynéco, il y avait une suspicion de fausse couche. Elle m’a prescrit de la progestérone. Que j’ai pris sans trop réfléchir. Aujourd’hui, je ne le ferais pas mais à ce moment-là, je n’avais pas le recul pour remettre en question la parole sacrée de la blouse blanche. Au fur et à mesure des rendez-vous, le discours était de plus en plus anxiogène, c’était ensuite suspicion de grossesse extra-utérine. Bref, beaucoup de stress.
Pour finir, j’ai fait une fausse-couche mi novembre…suivi d’un début d’hémorragie. Je sentais que ce bébé n’était pas viable. Si j’avais écouté ma petite voix intérieure, je n’aurais pas pris tous ces médocs pour « aller contre-nature ». Mais je n’ai pas osé.

Sur les conseils de ma gynéco, un matin au réveil, très affaiblie, je suis donc allée à l’hôpital pour voir une de ses collègues. Mon cher et tendre était malheureusement à Paris. J’ai donc du me rendre seule en taxi à l’hôpital. Je me suis présentée aux urgences où là, déjà, ça commençait bien. La nana a à peine levé le nez de ses papiers pour me maugréer un « vous êtes sur que c’est urgent? ». J’ai murmuré que je faisais une hémorragie, que selon moi, c’était urgent mais sans trop oser insister. On m’a ensuite fait attendre dans une salle puis une stagiaire est venue me planter une aiguille dans le bras sans rien me préciser de ce qu’il y avait dans la poche reliée à l’aiguille et quand j’ai posé la question, j’ai cru que j’avais insulté quelqu’un…On m’a ensuite fait traverser le service pédiatrie (sympa vu le contexte) en chaise roulante. L’interne qui me poussait saluait tout le monde à grands cris en faisant de grosses blagues…moi, je passais mon temps à renifler entre deux sanglots. Bonjour le contraste.

On m’a ensuite collée dans un lit à côté d’une jeune femme russe qui visiblement venait, elle aussi, de faire une fausse-couche. Des infirmières sont entrées sans bonjour ni rien me lançant juste un « qu’est-ce que vous faites là, vous ? »…Je pleurais de plus belle. C’était jour férié et visiblement cette aile-là ne devait pas être ouverte. J’essayais d’expliquer que je venais voir la collègue de ma gynéco mais ça n’avait l’air d’intéresser personne. Une heure ou deux après, un brancardier est entré dans la chambre et a embarqué mon lit…avec moi allongée dessus. Prise de panique, j’ai demandé des explications. Il m’a répondu : « bah, je vous descends au bloc, personne ne vous a prévenue ? « . Ah non, personne ne m’avait prévenue…et je ne savais pas ce que j’allais faire au bloc, j’étais juste venue pour voir une gynéco, moi.

Arrivée au bloc, la gynéco m’a dit que c’était plus facile qu’elle me reçoive directement ici étant donné qu’elle allait me faire un curetage. J’ai demandé si c’était obligatoire, s’il n’y avait pas d’autres alternatives moins radicales…et là encore, le pouvoir de la blouse blanche, je n’ai rien trop osé dire. L’anesthésiste est venu se présenter (enfin un qui prenait la peine de le faire) et m’a expliqué ce qu’il allait faire. Merci monsieur. Voilà à quoi elle servait cette perfusion alors.

En salle de réveil -enfin, dans le couloir à côté d’autres lits côte à côte- personne n’a trop cherché à savoir si j’allais bien. On m’a juste demandé si je voulais du doliprane dans ma perf.

Quand j’ai appris que j’étais enceinte en novembre de l’année suivante, tout naturellement, j’ai cherché une alternative à tout ça. J’ai fait une prise de sang chez ma gynéco. Elle m’a appelée en m’alertant déjà sur tout un tas de facteurs. Je me suis dit que je ne voulais pas de ce suivi axiogène. C’est une femme très sympa au demeurant mais son boulot est de dépister et soigner les maladies donc elle a un filtre dans ce sens. Je ne voulais pas renouveler cette expérience où on me colle des trucs dans ma perfusion sans me demander mon avis, où personne ne me parle vraiment, où je suis un numéro parmi tant d’autres. Je ne voulais pas imposer à mon bébé pour ses premières heures de vie des bras inconnus, de la lumière néon, des blouses blanches, des termes médicaux, des médicaments. Je voulais un nid, un cocon, juste nous 3 : la nouvelle petite famille qui voyait le jour.

J’ai fouiné sur internet et j’ai fini par dénicher la seule « maison de naissance » de Bruxelles. Je mets des guillemets car pour moi, ce n’est pas une réelle maison de naissance dans le sens où il n’y a jamais qu’un seul accouchement à la fois. La sage-femme, Rikke Qvist, qui m’a suivie est une femme formidable. Très à l’écoute. Qui me proposait des alternatives à toutes les obligations sur médicamentées et sur médicalisées. Un vrai bonheur. Elle savait calmer mes doutes en répondant simplement à mes questions. Mon mari était présent à quasi toutes les consultations et notre projet de naissance et de vie était pris en compte. Je n’ai vu un gynéco que 3 fois au cours de ma grossesse pour les échographies obligatoires.

Rikke devait partir en vacances au moment de mon accouchement, c’est donc sa collègue Natalie Van Belle qui a pris la relève. Quelques rendez-vous prénataux ont suffi pour que je me sente en confiance avec elle autant qu’avec Rikke.

Le jour J, elle était là, assistée sur la fin par une collègue, Clarisse, toute douce et maternante. Elles m’ont laissée le temps. Nous étions tous les 4 dans une chambre à la lumière tamisée et musique douce. J’ai pris un bain pendant la majeure partie du travail. Elles m’ont encouragée, entourée, secouée un peu parfois pour que je pousse plus fort. Quand Tom est sorti, elles l’ont stimulé un peu et me l’ont déposé sur la poitrine.
Le travail a été long, pas de tout repos mais à aucun moment je me suis sentie brusquée avec un timing à respecter. Je sais qu’à l’hôpital, Tom aurait droit à la ventouse voire aux forceps.

Nous sommes rentrés le lendemain matin à la maison. Nat est venue tous les jours, passant de longues heures à répondre à nos questions, à me rassurer, à m’aider à allaiter, à me montrer des trucs pour calmer et rassurer Tom quand il pleurait.

Alors non madame Odile Buisson, je ne suis pas une hippie-bobo accroc à la douleur, j’avais envie d’un accouchement naturel parce que je ne voulais pas être dépossédée de ma capacité à produire de l’ocytocine. Parce que mon corps en fournit suffisamment pour guider mon bébé vers la sortie alors je ne vois pas l’intérêt qu’on m’en injecte de synthèse. C’est mon corps, j’ai le droit d’avoir le choix. La naissance est un moment clé dans la vie de n’importe quel être. Mais ça, ça vous semble complètement saugrenu. Et pourtant, ça ne l’est pas : lisez les livres de Michel Odent.

Alors je me réjouis que la loi soit en bonne voie en France pour autoriser l’ouverture de maisons de naissance.

Pour info, ma journée à l’hôpital pour le curetage m’a coûté près de 1000 €. La nuit à la maison de naissance 200€.

Ne cherchez pas cette maison de naissance sur Bruxelles, malheureusement, Rikke a vendu sa maison et n’en a pour le moment pas rouvert une.
Avec le recul, ça me rassurait d’aller quelque part pour accoucher. Je sais aujourd’hui que j’aurais tout aussi bien pu le faire à la maison.

PS : et oui, c’est bien mon bidon avec Tom dedans sur la photo 😉

J'ai choisi d'accoucher dans une maison de naissance