24 avril 2013

Ok, on parle de décroissance mais concrètement, ça ressemble à quoi ? Je vais essayer de vous éclairer sur ma conception de la chose. Sur ce que ça veut dire aussi au quotidien et comment c’est possible.

Choisir de travailler moins, ça veut dire choisir de gagner moins. Comment on fait avec moins ? On se concentre sur l’essentiel. Déjà.

Et puis, aussi aberrant que ça puisse paraître, travailler moins, ça veut aussi dire dépenser moins. On économise sur :

  • les frais d’essence ou de transports en commun,
  • les frais de garde : pas de crèche ou de nounou à plein temps,
  • les frais de repas du midi, c’est toujours moins cher de manger à la maison,
  • les frais médicaux : on est moins stressé donc on est moins malade,
  • les frais vestimentaires car les fringues de « représentation » type costard-cravate ou tailleurs pour dames sont les plus coûteuses.

La décroissance, ça apporte aussi de bien beaux cadeaux.
Quand mon cher et tendre habitait encore en région parisienne, j’ai emmené beaucoup de passagers en co-voiturage lors de mes allers-retours à Paris. J’ai eu l’occasion de rencontrer plein de gens très sympas donc un super couple belgo-canadien : Thib et Sarah. Forcément, 3h enfermés dans une voiture à papoter : ça crée des liens.

Quand on est parti en repérage à Vancouver (on garde toujours dans un coin de notre tête une éventuelle migration là-bas un jour), on a cherché un moyen économique et sympathique de logement et on a découvert le couchsurfing.
Le concept : des gens très ouverts vous proposent leur canapé ou leur chambre d’amis gracieusement. Résultat : on a fait des rencontres magnifiques. Dany, le juge chez qui on a passé le plus de temps nous a même mariés…rien que ça. Et comme il nous fallait un deuxième témoin, en plus de Claudine, la femme du juge, on a proposé à Sandrine-une autre super nana qui nous avait hébergés en couchsurfing-. On a fait un mariage sur une plage de Vancouver sans chichis ni banquet. Un vrai mariage raccord avec la décroissance si cohérent avec ce qu’on est.

Bien évidemment, le cadeau le plus précieux, c’est tout le temps que ça nous permet de passer avec notre petit Troll. Le voir grandir et évoluer, s’esclaffer, jouer autrement que vite, vite le soir en rentrant du boulot. Ca nous permet aussi de ne pas devoir le réveiller le matin pour l’emmener à la crèche.

On est dans un autre rythme. Comme dans un monde parallèle. Du coup, j’accueille les journées où j’anime des formations avec plus de plaisir que si je devais y aller tous les jours à un rythme effréné. Je suis ravie de recevoir mes clients en consultations en fin d’après-midi.

Je suis très contente de ce choix de vie. Enfant, j’ai peu vu mes parents qui passaient leur temps au boulot + le temps de transport Paris-banlieue qui rallongeait leurs journées d’autant. Je n’ai manqué d’absolument rien matériellement mais j’ai cruellement manqué d’eux. C’était leur choix. Ca m’a appris aussi à être débrouillarde car j’étais souvent seule donc je ne m’en plains pas mais je me suis toujours dit que si j’avais des enfants un jour, je m’arrangerais pour passer un maximum de temps avec eux.

J’ai adoré le questionnement de la Gorane dans « Rendez-vous en terre inconnue » (vers 45 mn) sur le fait de ne pas avoir ses enfants avec soi quand on travaille…et les explications embarrassées de Sylvie Testud. Tant qu’on est dans le système, on ne le remet pas en question mais aussitôt qu’on prend un peu de recul, on se demande quel est le sens à tout ça. Pourquoi passer tout ce temps au travail ? pour gagner plus d’argent pour payer la nounou ou la crèche et pour payer la voiture et l’essence dont on a besoin pour aller travailler ?

Alors reste un point et pas des moindres quand on adopte la décroissance. La peur.
La peur de ne pas avoir assez en fin de mois, la peur de manquer si quelque chose arrive. J’y travaille, je lâche petit à petit. Je suis en chemin mais évidemment la peur est là quand on emprunte un sentier inconnu.

En février 2012, on a emménagé dans un nouvel appart plus grand, plus cher. Mon cher et tendre, fraîchement arrivé en Belgique, n’avait jusqu’à présent que très peu de plans boulot. J’ai donc dû assumer une grosse partie financière.
Là encore, je n’ai jamais dû demander le moindre euro à qui que ce soit pour payer le loyer de 975€. J’ai pourtant été enceinte et en congés maternité (statut indépendant donc très peu pris en charge). On ne bénéficie d’aucune aide. La décroissance pour nous ne signifie en aucun cas l’assistanat.Ni vivre dans la misère. Comme toujours, l’Univers a l’air de nous prouver qu’on est dans le juste.
Et comme pour nous encourager, on a reçu ou racheté beaucoup de choses de notre entourage à la naissance de Tom. C’est un bébé roi de la récup : ses fringues, son lit, son parc, sa poussette, ses jouets. Tout ce qu’il a a une histoire car ce sont des choses qui ont appartenu à d’autres petits bouts et je trouve ça très poétique. Et ça a un énorme avantage écologique, on évite un nouvel impact pour la planète en n’achetant pas de choses neuves.

Je ne me pose pas comme un modèle absolu que tout le monde doit suivre. Je dis simplement que moi, j’y trouve plus de cohérence. Libre à chacun de faire les choix qui lui conviennent. Je crois que tant que j’étais dans le système, je n’ai jamais envisagé qu’autre chose existait. C’est pour ça que j’ai décidé de partager : pour montrer que d’autres possibles existent et sont viables.